Villes et territoires

Les enjeux du secteur 

Les villes et l’organisation des territoires sont un élément clé dans la lutte contre le réchauffement climatique. Source de 31% des émissions de gaz à effet de serre en France, ce secteur est encore largement marqué par les transports carbonés, une surconsommation d’espace et une multiplication des flux. L’étalement urbain et l’artificialisation des sols représentent une composante centrale du mode de fonctionnement hérité de ce modèle socio-économique.

Actuellement, l’organisation territoriale dictée par une utilisation prédominante de la voiture produit une artificialisation des terres dont le taux de 10% pourrait passer à 14% en 2050 et 20% en 2100 sur les tendances actuelles. Ces processus sont difficilement réversibles. Ce système territorial est à évolution structurellement lente. Il faut donc agir sur l’existant.

La préservation des sols est aussi nécessaire car ceux-ci contribuent à stocker du carbone, et sont une ressource très lente à se renouveler. De plus, cela a de nombreux bénéfices environnementaux, dont la résilience des territoires face au changement climatique, la protection de la biodiversité, ou des enjeux de santé publique.

La lutte contre l’artificialisation et l’étalement urbain implique un changement structurel dans le rapport que les sociétés entretiennent au territoire et donc dans son aménagement. Cela passe par exemple par le renforcement des pôles urbains et bourgs ruraux, le développement des coopérations territoriales, ou le développement de formes urbaines centrées sur les services, les commerces, et les axes de transport.

Les positions des candidats quant à la décarbonation du secteur

Aucun consensus ne se dégage des mesures prises par les candidats. Certains n’abordent pas le sujet, d’autres envisagent des mesures très variées pouvant favoriser la stratégie ou la contrecarrer.

 

Pour la plupart, les mesures sont hétéroclites. L’action contre l’artificialisation est présente sous diverses formes avec des engagements plus ou moins stricts, allant jusqu’à zéro artificialisation nette pour certains, et à plus ou moins brève échéance. Pour soutenir la logique, certains s’attaquent aux grandes infrastructures et équipements des périphéries urbaines grignotant les terres agricoles : grand commerce, plateformes logistiques, entrepôts du e-commerce, les extensions d’aéroports, et  “grands projets imposés et inutiles”.

La question de la limitation de l’étalement urbain voire la conservation de la ville dans ses limites actuelles et l’action sur la relocalisation des emplois, ouvrant une réflexion plus globale sur le système territorial est plus rarement abordée. Mais on la retrouve dans les incitations à la mobilisation des friches et des locaux vacants principalement urbains.

 

Le thème de la résilience territoriale face au réchauffement actuel est par contre le grand absent. Il est couvert par deux candidats seulement mais de manière très partielle en n’abordant que la montée des eaux, ou la perméabilité des sols et la végétalisation en ville.

 

En parallèle, certaines mesures interrogent en impliquant un renforcement potentiel à la fois des rejets des émissions et de l’artificialisation. Plusieurs candidats appellent de leurs vœux une relocalisation des activités industrielles qui faute de prise en compte suffisante de protection des sols pourrait faire encore augmenter les besoins d’artificialisation. Il faut d‘ailleurs noter que plusieurs candidats s’attaquent à la réglementation en termes d’aménagement, allant de l’assouplissement des règles à la remise en cause totale de la loi SRU. Ces mesures doivent être prises avec prudence, car si elles peuvent contribuer à rapprocher les bassins de vie et d’activités d’un certain nombre de citoyens, elles pourraient aussi contribuer à l’étalement urbain et à l’artificialisation des sols.

Les leviers absents des programmes

De multiples mesures touchent à la nature même de nos transports, de notre agriculture ou des bâtiments pour lesquelles un certain nombre d’actions proposées vont dans le sens de la décarbonation.

 

Toutefois, la réorganisation de nos modèles territoriaux reposant sur la métropolisation n’est que très rarement évoquée alors que l’organisation générale du territoire français, des régions et des villes est une clé de la réussite de la décarbonation. Ainsi, les zones hors des métropoles comportent un bâti vacant très sensiblement supérieur aux métropoles susceptible d’accueillir sans construction logements et emplois.  Sortir de la métropolisation permettrait  aussi d’inscrire plus facilement ces zones urbaines dans un territoire agricole pour assurer une part significative de l’alimentation en circuits courts. 

 

De même, la réussite de la décarbonation implique un autre rapport à l’espace, aux localisations, aux pratiques dans les mobilités. L’idée de densifier l’habitat et les activités, de jouer sur l’ensemble de la trame urbaine et villageoise, de favoriser une trame d’activité centrée sur l’existant et agissant sur les flux, et bien d’autres objectifs encore, signifie un changement de paradigme. La densification facilite en premier lieu le développement des modes doux de déplacement facilités par la réduction des distances parcourues, mais aussi des transports en communs.

Retrouvez l’analyse et les propositions faites dans le cadre du Plan de Transformation de l’Économie Française du Shift Project pour ce secteur sur leur site.